Le Syndrome de Sigmaringen



Votre serviteur vous livre ici rapidement une réflexion qui lui trotte dans l’esprit depuis longtemps.

Il y a en France une tentation très forte, devenue avec les années une véritable maladie mentale, qui se traduit, chez toutes les personnes se piquant de réflexion intellectuelle, par deux symptômes :

1) Le dénigrement continu de leur pays, dans lequel elles ne voient jamais une réalisation nouvelle positive, et chaque jour une mauvaise nouvelle dont il faut se désoler. (Il est assez éclairant de constater que, dans certains médias, notamment de droite nationaliste, les seuls motifs de réjouissance viennent en général de l’étranger, ou de leurs micro-chapelles.)

2) L’admiration souvent aveugle et exclusive de modèles étrangers, comme par exemple, la Russie de M. Poutine, la Hongrie de M. Orban, le gouvernement de M. Trump il y a encore peu, ou à l’inverse l’UE, les pays scandinaves, la gestion gouvernementale allemande, le Canada, le gouvernement de M. Biden, etc.

Dans ce mode de pensée, la France est devenue une nation en perdition, une patrie décevante, un Etat méprisable, pour laquelle le salut ne viendra que de l’étranger.

Cette manière de voir, qui consiste à se haïr soi-même, est lourde de conséquences dans la sinistrose nationale, cette jérémiade devenue un sport national, et a sans doute sa part dans notre première place au podium international de la consommation d’anxiolytiques.

Cette manière de concevoir le pays est par ailleurs contraire à la vérité. Elle ne montre pas les réussites françaises au quotidien et à toutes les échelles, ce qui tient bon ou va mieux dans le pays, en se concentrant uniquement sur ce qui va mal ou moins bien. Elle ne permet pas de comprendre notre positionnement parmi les nations les plus développées et puissantes du monde. Elle permet par contre très bien de comprendre pourquoi un nombre important de nos scientifiques, artistes ou penseurs sont davantage connus à l’étranger que dans notre patrie.

Pourquoi parler du syndrome de Sigmaringen ? Le terme est volontairement provocateur, afin de provoquer la réaction du lecteur, et, espérons-le, un électrochoc.

En août 1944, les armées allemandes en retraite, emmenèrent avec elles, sur ordre du gouvernement du Reich, le maréchal Pétain, certains de ses ministres et plusieurs figures du régime de Vichy. Ils furent suivis par une petite cohorte de partisans de la collaboration. Retenus au château et dans la petite ville de Sigmaringen, au sud de l’Allemagne, loin de se considérer et de se proclamer prisonniers du Reich, ces exilés se sont raccrochés à la puissance qui les avaient déportés. Depuis Sigmaringen, cette poignée de vichystes a constitué, sous la surveillance allemande, un Etat fictif en exil, avec son organisation, ses publications officielles, son éphémère radio, etc. Le salut ne venait plus de France, mais de Berlin…

Il y a évidemment un peu d’excès de ma part, dans la comparaison, mais cette façon qu’ont, de nombreux Français, aujourd’hui, de voguer d’un exemple étranger à un autre, sans voir les ressources de leur pays et vivre dans la gratitude de ce qui se fait de bien, afin de mieux affronter ce qui va mal est symptomatique de cette manière qu’ont les vaincus d’aller insatiablement d’un château l’autre.

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